CHERTE DE LA VIE ET BAISSE DU POUVOIR D’ACHAT DE LA POPULATION : LES EXPLICATIONS DE L’ODEP – Juillet 2023

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I. LES PRIX DES PRINCIPAUX PRODUITS DE CONSOMMATION DE 2019- 30 JUIN 2023

 

PRODUITS

PRIX 2019

PRIX AU 30 JUIN 2023

Marché de la Liberté

Marché Rond-point Ngaba

Marché Central (Zando)

1

Sac de Manioc (Fufu 50 Kg)

89 000 FC

140 000 FC

160 000 FC

161 000 FC

2

Sac de Semoule : 25 Kg

                             50 Kg                       

20 500 FC

40 000 FC

41 700 FC

83 400 FC

43 000 FC

90 000 FC

46 000 FC

92 000 FC

3

Sac de charbon (Makala)

30 000 FC

55 000 FC

55 000 FC

57 000 FC

4

Sac de Riz (Lyon) : 25 Kg

                                50 Kg

27 000 FC

55 500 FC

56 400 FC

112 500 FC

49 500 FC

99 000 FC

57 550 FC

115 000 FC

5

Sac de haricot (Goma)

220 000 FC

419 000 FC

417 000 FC

420 000 FC

6

Sachet de Sucre (Kwilu Ngongo)

8 500 FC

12 500 FC

13 500 FC

13 500 FC

7

Carton Savon le Coq

10 500 FC

20 200 FC

22 600FC

23 500 FC

8

Carton Sardine Anny

52 000 FC

89 000 FC

87 100 FC

84 000 FC

9

Farde Cigarette (Stella)

10 000 FC

22 000 FC

21 500 FC

17 000 FC

10

Huile de palme : 5L

                           25 L

9 000 FC

45 500 FC

14 000 FC

57 000 FC

13 500 FC

56 000 FC

15 000FC

57 500 FC

11

Huile Végétale (Simba) : 5L

                                        25 L

14 500 FC

70 000 FC

25 000 FC

90 000 FC

22 800 FC

92 500 FC

22 850 FC

94 000 FC

12

Mayonnaise 45O g

5 200 FC

10 000 FC

10 500 FC

11 956 FC

13

Boite de Lait (Nido 2500 g)

47 000 FC

65 000 FC

67 000 FC

62 000 FC

14

Carton cuisses de poulet

31 000 FC

52 000 FC

49 000 FC

54 000 FC

15

Carton poulet Wilky (P9)

49 000 FC

69 500 FC

68 000 FC

75 000 FC

16

Carton poisson (Chinchards 20+)

81 000 FC

175 000 FC

180 000 FC

180 000 FC

 

AUTRES CHOSES

2019

2023

17

Taux de change (BCC)

1$ = 1 672, 95 FC

1$ = 2 396 FC

18

50 Unités de téléphonie mobile

1 000 FC

1 400 FC

 

II. QUELLE ANALYSE FAISONS-NOUS DE CES CHIFFRES SUR LA CHERTE DE LA VIE ET LA BAISSE DU POUVOIR D’ACHAT DES CONGOLAIS ?

Cette enquête a été faite pour faire comprendre au congolais de ne pas croire aux mensonges de ceux qui nous disent que la détérioration du pouvoir d’achat de tous les congolais est liée à la guerre entre l’Ukraine et la Russie.

La cause c’est nous-même congolais. Nous ne produisons pas assez nous-même pour notre consommation, pour notre sécurité alimentaire. N’oublions pas que les Etats Unis, la Chine, l’Union Européenne, sont d’abord et avant tout des grandes puissances agricoles et puis industrielles après.

Quelles sont nos difficultés actuelles qui freinent la production agricole et industrielle dans notre pays pour ne prendre que ces deux secteurs comme exemple.

2.1 De l’inspiration théorique des politiques publiques de la RDC depuis 63 années.

Dans la théorie économique du développement, depuis plusieurs décennies, il est possible de dresser un tableau en présentant un clivage fondamental autour de deux principales écoles :

  1. Pour le premier courant de pensée, le sous-développement n’existe pas en théorie. Il est un simple retard dans la croissance naturelle d’une société, retard qui peut être comblé par une politique de La simplicité des thèses défendues par ce courant que nous qualifions de « libéral », explique leur très grande diffusion, aussi bien dans les milieux universitaires qu’auprès des instances de décision (organisations internationales).
  2. Pour le second courant de pensée, le sous-développement est le produit historique du développement d’un nombre restreint d’économies, aujourd’hui dominantes. Cet état a tendance à se perpétuer par l’interaction de la dépendance externe et la dynamique des transformations sociétales du tiers-mode. Ce courant d’inspiration, d’abord humaniste, s’est nettement radicalisé avec l’exaltation du tiers-mondisme dans les années soixante. C’est le courant radical

A cause de la domination néo-coloniale depuis 63 ans, c’est le courant libéral qui a été imposé auprès de la classe régnante congolaise soutenu par la cellule d’économie publique de l’université de Lovanium sous la conduite des universitaires belges depuis les années 60.

Selon ce courant, les pays du tiers monde néo colonisés doivent se plier à une division internationale du travail qui leur est imposée.

Ils doivent se spécialiser dans le respect des dotations des facteurs d’où la nécessité du commerce international.

Le produit le plus représentatif de la doctrine néo-classique du commerce international est le théorème H.O.S. (Hershsher – Oklin – Samuelson). Il se résume dans la nécessité de l’échange international dû à la différence en dotation des facteurs entre les nations.

 

 

 

La croissance transmise par l’échange de marchandises.

Les libéraux affirment que la libre circulation internationale des marchandises conduit à des résultats optimaux pour tous les pays échangistes, et cela quelles que soient les différences de départ dans les propositions capital/travail. En effet, pour un pays donné, les échanges s’accroissant et la production nationale augmentant, les coûts faibles du facteur relativement abondant seront poussés vers la hausse puisque le facteur deviendra de plus en plus rare. L’avantage relatif initial s’estompera progressivement parce que les marchés nationaux des facteurs de production vont s’adapter mécaniquement aux conditions du marché international des produits.

La spéculation internationale devrait non seulement susciter l’accroissement généralisé des revenus mondiaux, mais créer partout les mêmes conditions et les mêmes chances de développement, en raison de la tendance à long terme à l’égalisation du prix des facteurs (salaires et profits).

La croissance transmise par les mouvements de capitaux

La comptabilité de la croissance et sa transmission externe ont été envisagées par Cairncros (1962)[1] à partir des mouvements internationaux de capitaux reliant économies avancées et économies attardées.

Puisque le développement suppose du capital-argent, il sera facilité par les apports des premières vers les secondes. L’auteur propose alors quatre étapes dans la croissance transmise : pays nouvellement emprunteremprunteur évolué nouvellement prêteurprêteur évolué.

Cette analyse a ouvert la voie à une littérature très abondante sur l’aide internationale et la capacité d’absorption interne. Une critique radicale de ces politiques, simple coup d’épée dans l’eau, sera faite un peu plus tard par T. Mende (1972) et bien d’autres, servant en réalité à justifier le bien-fondé des politiques d’assistance financière.[2]

La thèse néo-classique, optimise par nature puisqu’elle permet à tout pays jeune de devenir un jour rentier, repose sur la conviction naïve qu’il n’y a pas d’opposition d’intérêts dans le système mondiale, mais que ce sont les pays devenus les plus puissants qui garantissent les progrès des autres dans une totale harmonie.

C’est sans conteste oublier de s’interroger sur la façon dont s’est construite la puissance des nantis.

La dérive des secteurs

La vision moderne de la croissance transmise a été proposée par un spécialiste de la firme multinationale R. Vernon (1966)[3], auteur de « La dérive des secteurs industriels des pays riches (en capacité d’innovation, en revenus, en débouchés) vers les pays les moins riches ». Cette délocalisation d’activités obéirait au cycle international du nouveau produit, en vertu duquel un nouveau produit chasse l’ancien sur un marché donné, mais que ce dernier trouve une nouvelle jeunesse sur les marchés étrangers, sujets avec retard aux effets de démonstration. Le pays riche, en l’occurrence les Etats-Unis, abandonne ses unités de production en fin de croissance, celles-ci venant d’abord s’implanter en Europe, puis dans le tiers-monde, selon un schéma en escalier.

Selon R. Vernon, une telle délocalisation permet une redistribution perpétuelle des activités industrielles du nord vers le sud, mais les capacités technologiques d’innovation reste toujours fixées dans le pays à l’origine du processus.

On peut se demander si la théorie du développement ne donne pas elle-même une illustration du cycle du produit nouveau. Les données empiriques sont souvent intégrées dans des problématiques théoriques déjà élaborées pour d’autres fins que la connaissance particulière de la réalité du sous-développement. Ces problématiques ayant servi pour l’analyse des économies développées, sont en quelque sorte réinvesties dans l’analyse du sous-développement, comme des outils usés ou obsolètes mais encore satisfaisants pour les pays attardés.

Il est donc facile à comprendre pourquoi l’extraversion de notre économie demeure depuis 63 ans.

2.2 Quelles sont les conséquences de ce choix de demeurer dans l’extraversion sur les principaux secteurs productifs de notre pays ?

2.2.1 La situation du secteur agricole

1°) L’extraversion de l’économie congolaise

 

Notre économie continue depuis 63 ans repose sur le secteur exportateur (mines et agriculture de rente) et est dépendante de l’extérieur par la contribution de ce secteur  au PIB, les revenus d’exportation, l’importance du capital étranger investi et la technologie étrangère utilisée. Les produits miniers sont restés irrémédiablement pour la RDC :

  • La base de son économie ;
  • La source principale de ses recettes en devises ;
  • La source de financement et d’approvisionnement du pays en matière première, bien de premières nécessités et d’équipements.
  • La garantie de son endettement extérieur et du service de la dette.
  • La source la plus importante de ses recettes publiques

Dans une telle situation notre économique est très vulnérable. La détérioration des termes de l’échange et la chute des cours des produits primaires exportés par notre pays peut bloquer toute l’économie.

2°) Situation actuelle de l’agriculture

     

La situation de sécurité alimentaire en RDC indique que 80 % de population vivent en dessous du seuil de pauvreté, soit avec une consommation de moins de 2300 Kcal  et 76 g de protéines, ou 1.25 $ par personne et par jour. Le déficit alimentaire le plus important concerne : le riz, le maïs, le sucre et la viande.

En milieu rural, le revenu annuel par habitant est très bas. Le système traditionnel est peu productif et l’augmentation de la production est obtenue par la consommation d’espaces supplémentaires.

           

Les rendements moyens des principales cultures vivrières obtenus dans ce système sont très bas : 0,5 à 0,8 T/ha pour les céréales et les légumineuses, 3,7 T/ha pour la banane, 7 T/ha pour le manioc, 1,4 T/ha pour l’huile de palme.

 

Ces faibles productivités sont le résultat des pratiques culturales inadaptées, de l’absence d’intégration entre l’agriculture et l’élevage ainsi  que du manque de relation fonctionnelles entre la recherche et les producteurs.

 

3°) La place du secteur agricole

 

Ce secteur s’est maintenu dans un rôle d’accompagnement d’autres secteurs, c’est ce qui l’a plongé dans une crise chronique qui s’est traduite par l’insuffisance de la production alimentaire, l’insuffisance de l’approvisionnement industriel d’origine agricole et la chute de la production agricole exportée.

 

Les principales contraintes et problèmes non résolus durant les années de direction de l’Etat néo-colonial sont les suivants :

 

Sur le plan économique, il faut noter :

  • La détérioration des termes de l’échange des produits agricoles exportés ;
  • La réduction du pouvoir d’achat des populations conduisant à un rétrécissement de la demande solvable ;
  • La localisation inadéquate de la production par rapport aux centres de consommation entraînant des besoins de transports aériens, des prix rendus consommateurs élevés par la multiplication des ruptures de charges et des intermédiaires ;
  • La dépréciation des infrastructures et l’insuffisance des moyens de transport, et surtout, la dispersion de la production ;
  • La baisse de la production de l’agro-industrie consommatrice des produits agricoles.

Sur le plan institutionnel, il faut noter :

  • La croissance des fonctions bureautiques au détriment de l’appui technique, la multiplication des mécanismes fiscaux, l’absence de politiques cohérentes d’encadrement, de formation et de recherche, les expériences successives d’étatisation et de libéralisation qui ont désorganisé la production et la commercialisation, l’absence de données statistiques, la mauvaise utilisation des ressources et le manque de concordance entre la période de déblocage des fonds et le calendrier agricole etc.
  • Au niveau des institutions financières, la lourdeur administrative, les longs délais de mise en place des prêts, les taux d’intérêts non adaptés à la faible rentabilité des équipements, les conditions sévères d’accès au crédit, le manque d’organismes spécialisés pour l’agriculture paysanne ;
  • Au niveau des aides extérieures, le manque de coordination et la mauvaise définition des priorités.

 

 

Sur le plan technique, il faut noter :

  • En milieu rural, l’insuffisance de coopératives, le niveau de formation insuffisant, la dimension réduite des exploitations, le manque d’outils et de moyens de préparation des sols, les difficultés de commercialisation et de stockage, l’absence d’intrants, une main d’œuvre essentiellement féminine, un faible rendement à l’hectare ;
  • Au niveau des exploitations dites modernes et de l’agro-industrie, l’absence d’investissements, l’abandon des plantations, l’absence de cadres intermédiaires formés aux techniques modernes, l’inorganisation de la profession, la vétusté et le vieillissement des équipements, la mauvaise gestion
  • Au niveau des intermédiaires, l’insuffisance des moyens de transports, des prix non stimulants pour les agriculteurs, les abus des acheteurs en position de monopole.

En conclusion, à qui la faute ? aux colonisateurs ? pourquoi le secteur agricole et rural qui occupe la grande majorité de la population est toujours dans un tel état ??

 

2.2.2 La situation du secteur industriel

C’est d’abord en termes de modèle économique et de politique industrielle inadaptée qu’il faut aborder le diagnostic de ce secteur.

L’import substitution c’est là la principale orientation de l’industrie congolaise qui est très consommatrice de devises, notamment pour importer des biens d’équipement, assurer le transfert des dividendes et des rémunérations des cadres expatriés ainsi que les importations des matières premières et d’intrants divers.

Sur ce sujet, il faut noter d’abord que tous les produits que nous importons ne nous sont pas utiles, sachant que bon nombre d’entre eux nous avaient été imposés par la colonisation. Certains de ces produits sont par ailleurs de véritables véhicules de la domination culturelle étrangère, que l’on perpétue en acceptant de les fabriquer et de continuer à les consommer : pain, alcool, bière, etc.

L’industrie n’est pas mise au service de l’agriculture. On ne connait pas la production des PME et de l’artisanat en amont du secteur agricole. Aucun encouragement n’existe pour ce type d’entreprise qui aurait pu trouver leur place en milieu rural et contribuer à dynamiser le secteur agricole en créant des emplois afin de lutter contre l’exode rural.

Voici la synthèse des contraintes organisationnelles que ce secteur rencontre :

Le cadre institutionnel

Les diverses interventions de l’Etat dans le secteur industriel relèvent des divers départements et organismes mal coordonnés entre eux. Ces diverses structures sont sans moyens humains et financiers correspondant à leurs responsabilités. Ils engagent des actions fragmentaires, sans chercher vraiment à œuvrer en faveur d’une solution aux problèmes structurels du secteur.

Les sources de financement de l’industrie sont quasi inexistantes.

  • Les programmes d’enseignement supérieur non adaptés aux besoins du pays ont besoin des créateurs et des promoteurs nationaux d’entreprises ;
  • Les mauvaises liaisons de télécommunication, le mauvais état du réseau routier, de même que les nombreuses déficiences du système de transport faisant supporter à l’industrie des coûts élevés en raison des délais d’acheminement, de la fréquence des pertes, des vols et des détériorations ;
  • Une mauvaise politique énergétique laissant subsister des déséquilibres entre la production et la distribution de l’énergie ;
  • Le manque de soutien aux entreprises créées et gérées par les congolais ;
  • La concentration de l’administration économique dans la capitale défavorisant les entreprises localisées à l’intérieur du pays ;
  • Une agriculture ne produisant pas assez pour les besoins de l’agro-industrie ;
  • Le marché intérieur congolais est resté très étroit faute d’un transfert d’une bonne partie du surplus économique en direction du monde rural où il fallait créer des revenus afin d’étendre le marché du secteur industriel ;
  • La concentration des activités industrielles à Kinshasa, Katanga et le Bas-Congo.

Les conséquences de ces structures économiques pour le pays et pour le peuple

  • Une disparité trop grande les revenus et les salaires ;
  • Une étroitesse du marché de consommation locale indispensable à l’industrialisation du pays et à son développement global ;
  • Des graves problèmes sociaux : Exode rural des jeunes et vieillissement des campagnes, urbanisation insuffisante, insuffisance également de services sociaux, chômage, sous-emploi, malnutrition, logement insalubres, maladies endémiques, etc. ;
  • Concentration de la croissance dans quelques secteurs non prioritaires au détriment des secteurs primaires et secondaires ;
  • Dépendance financière et technologique de l’extérieur en raison du rôle important laissé à l’investissement étranger dans l’exploitation des ressources naturelles destinées aux marchés extérieurs et dans les infrastructures d’appui à cette exploitation ;
  • L’exportation des capitaux par l’importation des matières premières et des biens d’équipement, le service de la dette et le transfert des profits aboutissant en définitive à des sorties nettes de capitaux.

Quels enseignements tirer de cet héritage d’une industrialisation basée sur l’extraversion et la dépendance ?

L’échec du système néo-colonial est d’abord celui d’un modèle économique politiquement choisi par les différents régimes qui se sont succédé au Congo depuis 63 ans.

  1. Au Congo, le secteur productif capitalise est orienté presque exclusivement vers les grandes plantations agricoles, les productions minières et énergétiques destinées au marché mondial. La règle dite de l’avantage comparatif n’a fait que contribuer à accentuer la spécialisation stricte de notre pays dans ces productions. Le flux d’exportation de ces productions obéissent en même temps à la loi de l’échange inégal, c’est-à-dire, qu’il s’accompagnait d’un transfert de valeur dû au fait que les prix de productions des marchandises venant de chez nous sont inférieurs à leur valeur réelle.
  2. La classe régnante en RDC depuis 63 ans s’est toujours préoccupé de rechercher les capitaux à l’étranger, si nous totalisons le coût des voyages à l’étranger de notre Président actuel depuis janvier 2019 à ce jour, ce n’est pas moins de cent millions de dollars, pour aller chercher des investisseurs étrangers. L’arrivée de ces derniers et leur installation, se traduit presque exclusivement par un accroissement de la masse des profits, l’emploi étant élastique pour le taux de salaire de base.

La masse de profits est distribuée entre la caste au pouvoir, les intermédiaires commerciaux et les détenteurs du capital qui en rapatrient une partie substantielle.

  1. Les bénéficiaires locaux du profit, loin d’accumuler productivement, l’amoncèlent ou le consomment sous la forme d’achats de biens de luxe importés. Le salaire est resté faible ; le faible emploi créé ne peut constituer un élément générateur de la demande solvable.

III. CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS

3.1. Quelle inspiration théorique aiderait une construction pertinente des politiques de développement ?? C’est le courant radical.

Pour ce courant de pensée, le sous-développement est le produit historique du développement d’un nombre restreint d’économies, aujourd’hui dominantes. Cet état a tendance à se perpétuer par l’interaction de la dépendance externe et la dynamique des transformations sociétales du tiers-mode. Ce courant d’inspiration, d’abord humaniste, s’est nettement radicalisé avec l’exaltation du tiers-mondisme dans les années soixante. C’est le courant radical

Pour ce courant de pensée, le sous-développement est un processus de dépendance et de désintégration des structures. Ses indicateurs sont la pauvreté absolue, les multiples déséquilibres et inégalités, se traduisant sur le plan :

  • Politique : par l’oppression externe et interne
  • Economique : par l’exploitation impérialiste
  • Culturel : par l’aliénation.

Pour ce courant de pensée économique, le développement consiste en l’éradication de la pauvreté absolue, la satisfaction des besoins fondamentaux, l’intégration, la libération, la redistribution, la décentralisation du pouvoir, etc.

3.2 Construire une économie endogène pour gagner le combat de la 2ème indépendance

Comment une économie autocentrée est-elle articulée ?

Dans une telle économie, il existe une relation d’équilibre de croissance entre le flux intersectoriel au niveau de la production, des échanges et de la répartition du revenu global entre le capital et le travail, c’est-à-dire la demande solvable qui va vers chaque secteur. Le surplus économique reste sur place et détermine justement la répartition du revenu global. Le salaire va vers le secteur de production de biens de consommation de masse, les profits sont épargnés ou réinvestis. Le salaire a une fonction économique, il n’est pas qu’un coût de production, il y a une relation objective entre le salaire et le niveau de développement des forces productives.

Les relations externes économiques et/ou politiques sont soumises aux exigences de l’accumulation intérieure. Il existe une alliance des classes entre une bourgeoisie industrielle et agricole qui sont une classe dominante, dans le cadre d’un Etat national achevé et puissant.

Les structures économiques héritées de 63 années de néocolonialisme sont différemment construites : le capitalisme a été introduit de l’extérieur par domination politique. Il n’y a pas eu de désagrégation des rapports ruraux précapitalistes, mais leur déformation par soumission aux lois de l’accumulation du centre. Pas de révolution agraire, stagnation de la production agricole.

Pas l’alliance des classes dominantes internes, mais une alliance internationale entre le grand capital monopoliste et des alliés subalternes. Pas d’Etat national réellement achevé, indépendant, au service des classes locales, mais une néo-colonie. Le salaire n’est qu’un coût qui est maintenu aussi bas que les conditions économiques et politiques le permettent.

Comment construire le développement endogène ?

Ayant défini au départ les objectifs d’une telle voie, nous devrons nous interroger sur les directions dans lesquelles il faudra agir sur l’ordre mondial afin de favoriser la réalisation de ces objectifs.

  1. Ce développement est avant tout populaire, donc national
  2. L’industrie doit être mise au service de la productivité agricole
  3. Il faut abandonner la production de luxe pour le marché local et à l’exportation fondée sur la reproduction d’une force de travail bon marché (mieux servir les masses urbaines)
  4. N’ayant pas réalisé une révolution agraire préalable à la révolution industrielle, nous devrons renverser la valeur, c’est-à-dire que nous devrons articuler un secteur moderne de l’industrie rénovée dans ses orientations de base, au secteur des petites industries rurales qui permettent de mobiliser directement les forces latentes de progrès ;
  5. Seule une révolution dans le secteur agricole pourra financer une industrialisation saine, dégager un surplus vivrier capable d’assurer l’indépendance nationale ;
  6. L’industrie doit être mise au service des masses urbaines et rurales pauvres et cesser d’être guider par la logique financière qui favorise le marché local privilégié et l’exportation vers le centre ;
  7. Les emprunts éventuels à la technologie dont des modèles nouveaux devront être imaginés seront fait en fonction des besoins internes du développement populaire ;
  8. Le développement endogène, même s’il exige de compter d’abord sur ses propres forces, n’a rien à voir avec l’autarcie. Le pays se doit de recourir à l’importation des inputs nécessaires à l’accélération de son développement (équipement, énergie, certaines matières premières). Les échanges avec les occidentaux restent nécessaires mais doivent être qualitatifs.
  9. Il va falloir développer l’autonomie collective avec les pays de l’Afrique, l’Amérique Latine, l’Asie, le Moyen orient en agissant dans deux directions :
  10. L’entraide mutuelle (échange des matières premières, en évitant plusieurs intermédiaires)
  11. Contrôle national de l’exploitation des ressources naturelles. Les exportations doivent être réduites au niveau des importations exigées par la stratégie interne du développement endogène.

Actuellement, on exporte en fonction des besoins du centre et puis on se pose la question de savoir quoi faire avec les devises.

 

Pour l’Observatoire de la Dépense Publique (ODEP)

 

 

Florimond MUTEBA TSHITENGE

Président du Conseil d’Administration

 

 

 

 

Contact :

(+243) 897580434

823007510

[1] CAIRNCROSS A.K. : Factors in economic developpement, Allen and Univin, London, 1962

[2] HADLER J., Absorptive capacity : the concept and its determinants, Brookings institution, Staff, papper, 1965 GUILLAUMONT P. L’absorption de capital, Cujas, Paris, 1971

 MENDE T., De l’aide à la recolonisation, les leçons d’un échec, Le Seuil, Paris, 1972

[3] VERNON R. : International trade and economic developpement, Clarendon Press, Oxford, 1966

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